Un lézard peut passer de la femelle au mâle avant la naissance
Un lézard de Tasmanie est le premier animal non pondeur d’œufs connu pour changer parfois de sexe avant la naissance, en fonction des températures environnantes.
Le lézard de Tasmanie peut changer parfois de sexe avant la naissance
Certains poissons, grenouilles et reptiles qui pondent des œufs éclosent avec des organes sexuels mâles et des chromosomes femelles, ou vice versa, lorsque les œufs sont exposés à des environnements particulièrement chauds ou froids, cela produit un changement pendant l’incubation.
Peta Hill, de l’université de Tasmanie, et ses collègues ont découvert qu’il en était de même pour le scinque des neiges (Carinascincus ocellatus), un lézard de Tasmanie qui donne naissance à des petits vivants. Les chercheurs ont piégé 100 femelles nouvellement enceintes à différentes altitudes en Tasmanie et les ont placées dans des terrariums individuels dans leur laboratoire.
Un test avec 20 scinques
Deux groupes de 20 scinques ont eu accès à une lampe chauffante au-dessus d’une partie du terrarium pendant 4 ou 12 heures par jour, créant ainsi des zones de température allant de 20 à 37°C et tombant à environ 10°C lorsque la lampe était éteinte. Les trois autres groupes vivaient dans des températures contrôlées de 33°C, 29,5°C ou 26°C pendant huit heures par jour et de 10°C pendant les 16 autres heures.
Les chercheurs ont déterminé le sexe de chaque scinque nouveau-né en examinant ses organes sexuels au cours du premier mois de sa vie. Ils ont également attribué des sexes génétiques en séquençant l’ADN prélevé sur la queue des animaux.
Tous les scinques dotés d’organes sexuels femelles avaient des chromosomes XX, ce qui signifie qu’il n’y avait pas de changement de sexe. En revanche, 7 % des 423 scinques nouveau-nés avaient des organes sexuels mâles et des chromosomes XX.
Ces scinques étaient surtout présents dans les portées des terrariums les plus frais et nés de femelles vivant à des altitudes plus basses. Plus précisément, 20 % des petits dotés d’organes sexuels mâles et de chromosomes XX sont nés de femelles de basse altitude qui se trouvaient dans des terrariums à 26 °C ou qui ne bénéficiaient que de quatre heures de lampe chauffante par jour. Ce n’était le cas que de 2 % de la progéniture née de femelles de basse altitude conservées dans des conditions plus chaudes.
Un phénomène très unilatéral
Ces résultats sont « frappants » non seulement parce qu’ils sont observés chez un reptile vivant, mais aussi parce que ce phénomène est tellement unilatéral, déclare Benjamin Geffroy de l’Institut français pour l’exploitation de la mer à Montpellier, qui n’a pas participé à cette étude.
Malgré cela, cela pourrait s’expliquer par un effet de génération, dit Geffroy. Les scinques dotés d’organes sexuels mâles et de chromosomes XX – les « mâles XX » – peuvent devenir des mâles adultes fonctionnels et s’accoupler avec des femelles XX, explique-t-il. Mais comme ils n’ont pas de chromosome Y, tous les descendants du couple seront XX.
Une étude plus longue pourrait contribuer à appuyer cette théorie
« Je trouve très intéressant que nous puissions expliquer le penchant pour les femelles dans les conditions chaudes si nous considérons que certains mâles XX se reproduisent avec des femelles XX, ce qui entraîne un plus grand nombre de femelles génétiques dans la deuxième génération », ajoute-t-il. Selon M. Geffroy, une étude plus longue portant sur plusieurs générations pourrait contribuer à appuyer cette théorie.
Cette recherche a été publiée dans Proceedings of the Royal Society B.
Source : New Scientist
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