Les fluctuations du rythme cardiaque détectent la dépression
Une nouvelle recherche, présentée au congrès virtuel du Collège européen de neuropsychopharmacologie, a montré que la dépression peut être détectée en surveillant les fluctuations du rythme cardiaque d’une personne sur une période de 24 heures. Cette petite étude de preuve de concept a certainement besoin de plus de vérifications, mais elle met en évidence un nouveau biomarqueur qui pourrait être facilement intégré dans les systèmes de surveillance des patients.
La dépression et les fluctuations du rythme cardiaque
Cette nouvelle recherche à étudier cette association en recrutant 16 sujets présentant un trouble dépressif majeur (TMD) résistant au traitement. Cette petite cohorte a été associée à 16 témoins en bonne santé et le groupe entier a été suivi pendant quatre jours, avec un petit appareil portable enregistrant en permanence les données de la fréquence cardiaque.
« Nous avons constaté que les personnes souffrant de dépression avaient une fréquence cardiaque de base plus élevée et une variation de fréquence cardiaque plus faible, comme nous nous y attendions », explique Carmen Schiweck, chercheuse principale de ce projet, de l’université Goethe. « En moyenne, nous avons constaté que les patients dépressifs avaient un rythme cardiaque supérieur d’environ 10 à 15 battements par minute à celui des témoins ».
S’appuyant sur des recherches récentes qui ont mis en évidence les qualités antidépressives de la kétamine, cette cohorte a ensuite reçu soit un placebo, soit un traitement à la kétamine. Schiweck suggère que cela a permis aux chercheurs d’observer une amélioration presque instantanée des symptômes dépressifs et d’établir une corrélation avec les observations de la fréquence cardiaque.
« Après ce traitement, nous avons de nouveau mesuré le rythme cardiaque et nous avons constaté que le rythme et la fluctuation du rythme cardiaque des patients précédemment déprimés avaient changé pour se rapprocher de ceux des témoins », explique M. Schiweck.
La dernière partie de cette étude consistait à tester un système de classification informatisé et à déterminer si les sujets déprimés pouvaient être identifiés à partir des témoins sains en se basant uniquement sur les données des fréquences cardiaques. Ces données se sont avérées les plus efficaces pour identifier ces sujets déprimés.
Une précision de 90 %
« Normalement, les fréquences cardiaques sont plus élevées pendant la journée et plus faibles pendant la nuit », explique M. Schiweck. « Il est intéressant de noter qu’il semble que la diminution du rythme cardiaque pendant la nuit soit altérée dans les cas de dépression. Cela semble être un moyen d’identifier les patients qui risquent de développer une dépression ou de rechuter ».
Rien qu’en utilisant les enregistrements de la fréquence cardiaque, ce système pourrait identifier correctement 15 des 16 sujets témoins et 14 des 16 patients souffrant de dépression. Une fréquence cardiaque au repos plus élevée était également corrélée avec les patients dépressifs qui sont plus susceptibles de répondre positivement au traitement à la kétamine. Cela suggère que ce biomarqueur pourrait être utile pour classer les patients dépressifs qui bénéficieraient le plus d’un traitement à la kétamine.
« En termes simples, notre étude pilote suggère qu’en mesurant simplement votre fréquence cardiaque pendant 24 heures, nous pouvons dire avec 90 % de précision si une personne est actuellement déprimée ou non », conclut M. Schiweck.
Cette recherche n’a pas encore fait l’objet d’un examen par les pairs ni d’une publication dans une revue, et M. Schiweck se garde bien de souligner que cette étude est préliminaire et qu’elle doit être validée auprès de diverses populations de patients. Toutefois, les implications de ce travail sont convaincantes.
Un nouveau biomarqueur
Si cette recherche est validée, ce type de biomarqueur, facilement mesurable par le biais de nombreux dispositifs portables actuellement disponibles, pourrait être intégré dans des applications de surveillance de la santé pour servir de signe « d’alerte précoce » de dépression. Ce biomarqueur pourrait également être utilisé pour surveiller l’efficacité d’un traitement, ainsi que pour aider à déterminer quels traitements seraient les meilleurs pour un patient.
Cette recherche a été présentée récemment lors du 33e congrès virtuel de l’ECNP.
Source : European College of Neuropsychopharmacology
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