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Un nouveau télescope pour voir l'intérieur des exoplanètes

Espace 09 octobre 2019

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Les astronomes ont découvert plusieurs milliers d’exoplanètes, mais au-delà de leur taille, de leur masse et, pour quelques-unes d’entre elles, de précieux indices de ce qu’il y a dans la haute atmosphère, elles demeurent entourées de mystères. Mais la semaine dernière, en France, des chercheurs ont dévoilé un radiotélescope qui pourrait révéler ce qui se passe dans une exoplanète.

Un nouveau télescope cherchera des exoplanètes

Ce télescope, accordé pour la recherche de signaux radio en forme de faisceau fouettés par un champ magnétique, pourrait montrer si une planète possède une dynamo magnétique – un noyau métallique liquide en barattage, comme celui de la Terre. « Il s’agit d’une enquête sur la structure interne à laquelle il n’y a pas d’autre moyen d’accéder pour l’instant », explique l’astrophysicienne Evgenya Shkolnik de l’Arizona State University à Tempe, qui n’est pas impliquée dans ce projet.
Les découvertes de ce télescope pourraient aider les chercheurs à comprendre la formation des planètes et à déterminer si les six planètes qui ont des champs magnétiques dans notre système solaire sont typiques. Les signaux seraient aussi des indices sur l’habitabilité d’une planète. Les champs magnétiques protègent la surface d’une planète des rayons cosmiques et du vent des particules chargées de son étoile, qui peuvent nuire à la vie. En déviant le vent stellaire, un champ magnétique pourrait également empêcher les particules d’écumer l’atmosphère qui nourrit la vie d’une planète. « Cela ouvre une porte supplémentaire pour étudier les exoplanètes à distance « , dit Jean-Mathias Griessmeier de l’Université d’Orléans en France.
Inauguré officiellement la semaine dernière, ce télescope sera une station dans le réseau basse fréquence (LOFAR), un réseau radio européen centré aux Pays-Bas. Installé à la station de radioastronomie de Nançay en France, la nouvelle extension de Nançay Upgrading LOFAR (NenuFAR), comme son nom l’indique, aidera le LOFAR à trouver les signaux des premières étoiles de l’Univers. Mais elle consacrera aussi une grande partie de son temps à la recherche de signes de champs magnétiques exoplanétaires dans une gamme de radiofréquences. « Ce n’est qu’une question de temps avant d’avoir une détection, probablement des mois », prédit Shkolnik.
Même le signal fort de Jupiter est trop faible pour être vu à des années-lumière de distance. Mais beaucoup des exoplanètes détectées jusqu’à présent sont des « Jupiters chaudes », des géantes gazeuses qui sont en orbitent autour de leurs étoiles plus près que Mercure ne le fait le Soleil. Une telle planète serait secouée par un vent stellaire plus fort – offrant plus d’électrons pour être transformés par la magnétosphère de la planète en un signal qui pourrait être un million de fois plus fort que celui de Jupiter. En théorie, un faisceau aussi puissant pourrait être détecté depuis la Terre grâce à ce nouveau télescope.

NenuFAR est plus sensible aux basses fréquences

Des réseaux comme le LOFAR ont déjà trouvé des signaux suggestifs, mais rien de certain. NenuFAR est plus sensible aux basses fréquences et dédié à la chasse des exoplanètes, peut avoir plus de chance. Il contiendra à terme près de 2000 antennes ressemblant à des arbres de Noël dénudés à armature métallique. La plupart d’entre eux se trouveront dans un noyau de 400 mètres de large, et quelques-uns seront plus répandus. Les récepteurs captent des fréquences inférieures à 85 mégahertz – le bas de la bande radio FM – jusqu’à 10 mégahertz, au-dessous desquelles l’ionosphère bloque tout signal provenant de l’espace.

NenuFAR collecte des données depuis juillet et 60% de ses antennes fonctionnent. Lors de l’inauguration, le chercheur principal du réseau, Philippe Zarka de l’Observatoire de Paris à Meudon, a déclaré qu’il espère avoir 80 % du matériel en place d’ici la fin de l’année pendant que l’équipe recherche davantage de financement. Jusqu’à présent, elle a obtenu 80 % des 15 millions d’euros nécessaires à la construction et à l’exploitation du réseau, auprès de bailleurs de fonds gouvernementaux, d’universités et d’autorités locales.
L’équipe de NenuFAR consacrera bientôt des journées d’observation d’une douzaine de Jupiters chaudes à proximité, en attendant qu’un faisceau d’énergie radio passe devant la Terre. D’autres observatoires se joignent à la chasse. L’Owens Valley Long Wavelength Array en Californie aura 352 antennes lorsqu’il sera terminé l’an prochain. Il n’est pas aussi sensible que NenuFAR, donc plutôt que de se concentrer sur des exoplanètes connues, il observera tout le ciel en continu. Avec un peu de chance, il captera l’éclair radio rare et très lumineux d’une planète frappée par une éjection de masse coronale – une bulle de vents stellaires en mouvement rapide – dit Gregg Hallinan, chercheur principal du California Institute of Technology à Pasadena.

NenuFAR et les autres télescopes terrestres seront limités à la détection de Jupiter chaudes 

Comme NenuFAR et les autres télescopes terrestres ont une limite inférieure de 10 mégahertz, ils seront limités à la détection de Jupiter chaudes – des endroits improbables pour la vie. Les exoplanètes terrestres ont probablement des champs magnétiques plus faibles qui produisent des émissions radioélectriques inférieures à 10 mégahertzs. Pour échapper à l’ionosphère qui bloque les basses fréquences, les radioastronomes devront chercher dans l’espace ou de l’autre côté de la lune. Le dernier plan pour un radiotélescope lunaire, connu sous le nom de Farside Array, est actuellement à l’étude dans le cadre de l’enquête décennale américaine sur l’astrophysique, un exercice d’établissement des priorités.
Source : Science
Crédit photo : Pixabay