Parkinson : une infection intestinale causerait cette maladie
Une nouvelle étude publiée par des scientifiques montréalais dans Nature révèle qu’une infection intestinale peut entraîner une pathologie semblable à la maladie de Parkinson (MP) chez un modèle murin dépourvu de gène lié à cette maladie.
Une infection intestinale peut mener à la maladie de Parkinson
Cette découverte prolonge les récents travaux du même groupe, suggérant que la MP a une composante immunitaire majeure, ouvrant de nouvelles voies à des stratégies thérapeutiques.
L’étude collaborative était le travail d’une équipe conjointe de scientifiques dirigée par Michel Desjardins et Louis-Eric Trudeau de l’Université de Montréal, ainsi qu’Heidi McBride de l’Institut neurologique de Montréal et Samantha Gruenheid de l’Université McGill.
Le nombre de patients atteints de la MP dans le monde a plus que doublé entre 1990 et 2016, passant de 2,5 millions à 6,1 millions et plus de 12 millions de patients dans le monde d’ici 2050.
Environ 10% des cas de la MP sont dus à des mutations de gènes codants pour des protéines telles que PINK1 et Parkine, qui ont été liées à la mitochondrie (l’organelle dans les cellules qui produit de l’énergie). Les patients porteurs de ces mutations développent la MP beaucoup plus tôt. Toutefois, dans les modèles murins, les mêmes mutations ne génèrent pas de symptômes de la maladie, ce qui a amené de nombreux chercheurs à conclure que les souris ne convenaient peut-être pas à l’étude de la MP.
Trudeau et McBride, deux spécialistes dans le domaine de la recherche sur la MP, soutiennent que les résultats de cette nouvelle étude pourraient expliquer cette disparité: ces animaux sont normalement gardés dans des installations sans germes; des conditions non représentatives de celles rencontrées par des êtres humains constamment exposés à des micro-organismes infectieux.
Gruenheid, un microbiologiste, est convaincu que le lien entre l’infection et la MP stimulera la poursuite de l’étude de la réponse immunitaire liée à l’initiation de la maladie, permettant ainsi aux chercheurs de développer et de tester de nouvelles approches thérapeutiques.
La MP est causée par la mort progressive d’un sous-ensemble de neurones dans le cerveau, appelés neurones dopaminergiques. Cette perte de neurones est responsable des symptômes moteurs typiques observés chez les patients atteints de la MP, y compris les tremblements et la rigidité. Les causes de la mort des neurones dopaminergiques sont encore inconnues.
Des modèles qui n’explique pas certains aspects de cette maladie
« La plupart des modèles actuels de la MP sont basés sur la conviction que les neurones meurent en raison de l’accumulation d’éléments toxiques à l’intérieur de ceux-ci », a déclaré Trudeau, neuroscientifique. « Cela n’explique toutefois pas le fait que cette pathologie est initiée chez des patients plusieurs années avant l’apparition de la déficience motrice et de toute perte notable de neurones. »
On pense que la raison est expliquée par les résultats de la présente étude. L’équipe montréalaise a montré que chez les souris dépourvues d’un gène lié à la MP, une infection par une bactérie causant de légers symptômes intestinaux chez de jeunes souris était suffisante pour déclencher des symptômes analogues à la MP chez ces animaux plus tard dans leur vie.
L’administration de L-DOPA, un médicament utilisé pour traiter les patients atteints de la maladie de Parkinson, pourrait remédier temporairement aux symptômes ressemblant à la maladie de Parkinson. Desjardins et Diana Matheoud, une immunologiste, soulignent que chez des souris normales, le système immunitaire a bien répondu à l’infection de l’intestin.
Cependant, chez les souris dépourvues du gène PINK1 lié à la maladie de Parkinson, le système immunitaire a réagi de manière excessive et a déclenché une «auto-immunité», un processus qui mène le système immunitaire à attaquer les cellules saines de l’organisme. Les résultats publiés dans Nature suggèrent qu’au lieu de mourir par l’accumulation de toxines, la destruction des neurones dopaminergiques proviendrait des cellules immunitaires.
Des résultats qui suggèrent un lien avec certaines formes de la MP
Chez les souris mutantes infectées, des lymphocytes T toxiques autoréactifs se sont révélés présents dans le cerveau et étaient capables d’attaquer des neurones sains dans des boîtes de culture. Les copremiers auteurs de l’article, Matheoud et Tyler Cannon, un étudiant diplômé en microbiologie, soulignent le fait que ces résultats suggèrent fortement que certaines formes de la MP sont une maladie auto-immune susceptible de se manifester dans l’intestin plusieurs années avant que les patients ne s’en aperçoivent.
Cette découverte collaborative passionnante a nécessité l’expertise d’un microbiologiste, d’un immunologiste, d’un neuroscientifique et d’un biologiste cellulaire, ce qui souligne la complexité de cette maladie dévastatrice.
Source : Université de Montréal
Crédit photo : Pixabay